Carnet d'inspiration d'un styliste : Mitri Hourani

Artiste, créatif, à la tête de sa propre maison d'éditions Boboboom, Mitri Hourani aime les objets qui ont une histoire et sait les mettre en valeur comme personne. Il recycle et travaille sur mesure. Ses clients sont aussi bien les particuliers que les hôtels et les architectes.

Quel est votre parcours ?
Je suis né en Afrique en janvier 1966. Ma jeunesse s’est partagée entre le tumulte urbain de Beyrouth et la vie pleine de liberté que nous offrait la Côte-d’Ivoire. Mon parcours étudiant est très classique. Je me suis installé à Aix-en-Provence à 18 ans où j’ai suivi les cours des Beaux-Arts. Touche-à-tout, styliste-modéliste de formation, j'aime par dessus tout le contact avec les tissus et le travail des matières. 

J’expose au sein du salon international Maison & Objet depuis plus de 22 ans et j’ai reçu en 2002 le Prix "Les Découvertes" pour ma lampe ourson.
Boboboom est né il y a trois ans et demi. Dès le début, je me suis intéressé aux relations qui se posent entre le consommateur, l’acte d’achat et l’environnement. Faut-il absolument produire du "neuf avec du neuf" ou ne peut-on pas redonner vie à des objets/matières qui ont déjà vécu mais qui ont un état intrinsèquement neuf ? Est-ce que je faisais déjà de l’upcycling sans le savoir comme Monsieur Jourdain faisait de la prose ? Je l’ignore. Mais cette marque revendique son ancrage dans les codes du passé et une certaine modernité. Un abat-jour grand-mère ne surprend personne mais il fait naître le sourire lorsque les tissus qui l’habillent sortent complètement de la norme.

Comment vous définissez-vous ? Quel est votre métier ?
Je ne me sens pas et ne me revendique pas designer. Moi, je suis prototypiste ou styliste. Un designer dessine sur une feuille blanche, imagine une forme, part de rien pour arriver à tout. Moi, je pars à la rencontre d’artisans, je les regarde travailler, j’observe leur technique et ensuite seulement, j’imagine un objet qui naîtra de leur savoir-faire ; j’aime détourner un objet de sa fonction première pour lui conférer un autre usage. C’est un autre exercice.

Qu'est-ce qui guide vos choix dans les produits que vous vendez ?
Les produits que nous commercialisons sont ceux dans lesquels nous vivons. Un an, deux ans parfois avant que l’objet ne fasse partie d’une collection, on l’accueille dans notre décor et on le fait vivre. S’il se fait aimer, si on se sent bien avec, si nos amis nous le réclament alors on commence à envisager sa commercialisation.

Vos sources d'inspiration ?
Ce sont la rue, les gens, leur façon de vivre et... ce qu’ils jettent ! Une collection n’est pas une succession d’objets posés l’un à côté de l’autre. C’est une histoire dont chaque création est un élément, comme des comédiens dans une pièce de théâtre.  

Quels sont les objets qui ont marqué votre carrière ?
Je préfère parler de matières... Le cristal, la porcelaine, le canevas, le jean, le bois... 

Qu'aimez-vous en décoration ?
Le détournement, le caractère, l’imagination, la personnalité et l'inattendu. La notion de bon goût est très relative. Pour moi, le mauvais goût n’existe pas. D’une accumulation d’éléments disparates peut naître un goût, un style.

Comment définiriez-vous votre style ? 
Il est collectif dans le sens où il découle de la mémoire commune et difficilement définissable car je veux que les objets soient adoptés par les clients, ils doivent donc prendre leur style. Je veux que mes créations s’intègrent aux ambiances des clients comme si elles en avaient toujours fait partie.

Quelles sont pour vous les nouvelles tendances déco pour 2013 ?
Ça ne veut rien dire "la tendance déco" ! La tendance, elle fait de plus en plus partie de chacun, il y a de plus en plus de mouvements, de chapelles, de dogmes, chacun trace son sillon.

Chez Mitri Hourani pour Noël
J'avais composé un mur de petites maisonnettes de bois dans lesquelles j'avais caché des petits cadeaux pour les amis.


La couleur 2013 ?
Pas une couleur mais je pense que le brillant et l’or reviennent dans une version moins agressive qu’il y a cinq ou six ans. Selon moi, le bling bling devient bobor (bobor = bourgeois boring/ennuyeux) et c’est très intéressant.

Votre dernier achat coup de coeur déco ?
Un seau pour ranger des magazines car je n’en jette aucun !

Les magasins dans lesquels on peut trouver vos créations ?
Elles sont disponibles sur le site www.boboboom.com.

Images © Stéphanie CAUMONT & Boboboom