Le Palais Bulles, une architecture pour étonner le monde


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Dominant la mer, une cascade de rondeurs douces aux couleurs de la roche apparaît entre les virages de Théoule-sur-Mer : le Palais Bulles, avec ses mille hublots scintillant sous le soleil, semble appartenir à un autre monde. C’est le couturier et collectionneur Pierre Cardin qui, dans les années 1970, tomba amoureux des bulbes de l’architecte Antti Lovag et s'est porté acquéreur de cette folie architecturale. "Mon intention était ici de construire une maison, et l’on a pensé que c’était le lieu où l’on pouvait trouver une architecture qui permettait d’étonner le monde", explique-t-il. Et sans nul doute, pénétrer dans cet étrange bourgeonnement de pierres est une expérience hors du commun.  
Une maison ondulante

Au Palais Bulles, les excentricités d’Antti Lovag s’étendent sur 1 200 m². A côté d’un amphithéâtre de 500 places qui accueille diverses manifestations culturelles, la maison en elle-même comporte une salle de réception, un salon panoramique et pas moins de 10 suites, toutes décorées par des artistes contemporains. Au dehors, une piscine, des bassins et un jardin forment un espace de 8 500 m².

Tout, du sol au plafond, du dehors au dedans, épouse des formes sphériques. La lumière de Méditerranée pénètre généreusement par les innombrables hublots : un travail d’artiste où les ombres jouent avec les rondeurs pour tracer de véritables tableaux de lumière. "C’est le corps d’une femme", aime à dire Pierre Cardin, "tout est absolument sensuel". Et, lové dans les courbes infinies du Palais, l’on se surprend à contempler le paysage, où les falaises ocres, les palmiers du jardin et les flots bleus de la Côte d’Azur s’assemblent harmonieusement. Une invitation à la rêverie…  


Antti Lovag, un architecte révolutionnaire

Oublier les angles stricts et les arêtes rigides pour imaginer un habitat en adéquation avec les formes naturelles de l’environnement : cette base simple va permettre à Antti Lovag de se réapproprier totalement l’espace. Pour l’architecte, cette révolution de l’habitat est avant tout un retour aux racines, un retour aux principes fondamentaux des habitations ancestrales (les grottes, les maisons troglodytes, etc.).

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Le salon
Né en Hongrie dans les années 1920, Antti Lovag suit d’abord des cours d'architecture navale à Stockholm avant de venir poursuivre ses études à Paris. C’est au début des années 1960 qu’il commence à envisager une architecture radicalement différente, au côté de Jacques Couëlle, et s’inspire des formes de la nature pour imaginer une habitation plus naturelle, en harmonie avec la morphologie humaine. Antti Lovag se dit désormais "habitologue", et étend les principes de son travail à toutes les composantes de la maison : le mobilier s’adapte aux courbes et devient pluri-fonctionnel, la lumière n’est plus cassée, mais entre directement, et les éléments naturels, tels que l’eau ou la roche, ont aussi leur place à l’intérieur du bâtiment.

En 1971, l’architecte entreprend la première construction d'une maison-bulle, grâce au mécénat de l’industriel Pierre Bernard. En 1975, il entame la "maison Cardin", à laquelle de nombreux travaux supplémentaires seront commandés, si bien qu’elle ne sera terminée qu’en 1989. Sa troisième maison bulle, la "maison Gaudet" sera construite entre 1986 et 1989 à Tourette-sur-Loup et fut classée monument historique par le Ministère de la Culture en 1998. Controversé, Antti Lovag fera face à de virulentes oppositions. La révolution n’a pas eu lieu, mais cela n’empêche pas cet habitologue de continuer à dispenser sa philosophie de l’habitation au sein de son univers sphérique.  


La face méconnue de Pierre Cardin : designer et collectionneur

Le célèbre couturier Pierre Cardin n’est pas qu’une victime de la mode. Depuis plus de 50 ans, il collectionne les objets originaux de créateurs contemporains et dévoile un dessein particulier au Palais Bulles : "ici, j’ai trouvé le lieu qui me permettait d’incorporer ce que j’avais rêvé et collectionné", pour "faire une unité de musée futur. Il est certain que dans 10 ou 15 ans cela aura une très grande résonance de conception culturelle".  

piscine
La piscine
Chacune des 10 suites du Palais Bulles a été décorée par des artistes contemporains, tels que Patrice Breteau, Jérome Tisserand, Daniel You, François Chauvin ou Gérard Le Cloarec. Ses objets insolites ont tous une histoire, une raison d’être. Par exemple, la télé noire du salon, création originale, peut se tourner dans tous les sens : "c’est la forme d’un œil en réalité". Lui-même est d’ailleurs aussi designer, et il a placé quelques une de ses conceptions dans le Palais. Ainsi, les sièges du salon ont été dessinés par Pierre Cardin et réalisés par le tapissier Claude Prévost : ce sont des sculptures inspirées de la nature, du végétal et des racines de la terre.  


L’étrange vaisseau de bulles s’apaise aux rayons du soir. C’est l’heure magique où la baignoire en alcôve et la terrasse sphérique deviennent des endroits parfaits pour savourer le panorama. La "grande sculpture habitable", comme la désignait l’artiste César, accueille en réalité sous ses multiples coupoles un intérieur unique, où les méandres d’un architecte de génie rejoignent désormais les créations les plus originales d’artistes contemporains. "Ici, je suis heureux", confie Pierre Cardin, et même, se prenant à rêver, "s’il y a un paradis, en tout cas j’aimerais bien qu’il soit comme celui-ci".  

Informations pratiques
Le Palais Bulles - Boulevard de l'Esterel - Théoules-sur-Mer
www.palaisbulles.com

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